Blue Jasmine

C’est toujours la même sauce avec Woody Allen : un film par an qui s’achève à chaque fois par un coup de cœur ou un coup de gueule. Ici, pas de quoi s’énerver, on est plutôt du (très) bon côté. Aucune surprise à l’horizon, on reste en terrain connu dès les premières scènes : Jasmine (Cate Blanchett), une bourgeoise dépressive et aujourd’hui ruinée depuis que son escroc de mari milliardaire s’est suicidé en prison, quitte son New York de luxe pour s’incruster chez sa sœur à San Francisco, histoire de remettre de l’ordre dans sa vie. Mais au vu d’un comportement qui frise la folie obsessionnelle, l’entourage de la sœur finit par voir d’un mauvais œil l’arrivée de cette femme à la ramasse… Le seul véritable souci de cette intrigue est de ressembler un peu trop à celle d’un magnifique chef-d’œuvre signé Elia Kazan (Un tramway nommé Désir) : d’abord parce que notre connaissance de ce film atténue quelque peu la surprise des dernières scènes (lorsque la vérité autour de Jasmine refait surface), ensuite parce que l’on n’y retrouve jamais la puissance torride qui imprégnait le film de Kazan dans son propos jusque dans sa scénographie. Sans surprise, Woody en reste à ce qu’il sait faire le mieux, à savoir injecter une dose massive de cruauté dans sa dissection des rapports humains et des mécanismes sociaux. Un registre dans lequel il avait atteint un absolu insurpassable avec Match Point et qu’il remet ici au premier plan, dans un récit plus complexe que prévu, où l’humour des situations tend à renforcer la tragédie du propos. Autant dire que l’on rit jaune à chaque nouvelle scène, en suivant le bilan de cette quadragénaire timbrée au fil des flashbacks parfaitement agencés. Reste l’affaire Cate Blanchett. Que la plus grande actrice américaine du moment nous inflige à nouveau une leçon d’acting sans donner l’impression de se forcer, ça, on est habitué et on reste béat d’admiration. Mais que sa prestation grandiose (et largement oscarisable) finisse par absorber et détruire les efforts du reste du casting, là, c’est un peu plus gênant : le personnage a beau ne pas être présent dans toutes les scènes, il tend presque à monopoliser l’attention. Un détail qui empêche le film d’accéder au firmament de ce qu’il pouvait offrir sur les ravages du quotidien, mais qui offre toutefois à Woody l’occasion de réussir enfin ce qu’il avait raté avec Melinda et Melinda.

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