Air Doll

REALISATION : Hirokazu Kore-eda
PRODUCTION : Bandai Visual Co. Ltd., Eisei Gekijo
AVEC : Doona Bae, Itsuji Itao, Arata, Jô Odagiri
SCENARIO : Hirokazu Kore-eda
PHOTOGRAPHIE : Ping Bin Lee
MONTAGE : Hirokazu Kore-eda
BANDE ORIGINALE : World’s end girlfriend
TITRE ORIGINAL : Kûki Ningyô
ORIGINE : Japon
GENRE : Fantastique, Adaptation
DATE DE SORTIE : 16 juin 2010
DUREE : 2h05
BANDE-ANNONCE

Synopsis : Tokyo. Une poupée d’air habite l’appartement sordide d’un homme d’une quarantaine d’années. Elle ne peut ni parler, ni bouger, mais elle est la seule compagne de son propriétaire. Il lui parle, prend son bain avec elle, et lui fait l’amour chaque soir, en rentrant du travail. Mais un jour, le fantasme devient réalité : la poupée prend vie et développe des sentiments humains. Comme un nouveau-né, elle découvre un monde inconnu qu’elle aspire à découvrir. Elle s’aventure alors dans les rues de la ville, fascinée par tout ce qu’elle voit, mais les gens qu’elle rencontre sont incapables de lui expliquer ce que veut dire “être en vie”… C’est en poussant la porte d’un vidéoclub qu’elle obtient enfin une réponse : elle fait la connaissance de Junichi, le vendeur, et tombe aussitôt amoureuse de lui. La poupée est embauchée au magasin et noue chaque jour des liens de plus en plus forts avec Junichi : ils vont ensemble au cinéma et sillonnent la ville … comme un couple. La poupée est parfaitement heureuse jusqu’au jour où elle se coupe la main par accident et se met à dégonfler devant Junichi…

On pourrait dire qu’Air Doll, réalisé par Hirokazu Kore-eda, est l’histoire d’une poupée gonflable qui prend vie, à l’instar de Pinocchio, le petit pantin fabriqué par Geppetto. La musique, composée par World’s end girlfriend est assez enjouée et légère, elle nous inspire l’univers du conte. Si le film reprend ce modèle, on peut se demander s’il ne se détache pas encore plus du réel, étant davantage une réflexion métaphysique qu’une histoire à part entière. Notre poupée est avant tout un objet créé pour combler les désirs sexuels des hommes, un sex toy à apparence humaine, on note évidemment le fossé avec les aventures de Pinocchio puisque le thème et le traitement dénotent d’une atmosphère bien plus sombre. Les scènes érotiques avec la poupée gonflable nous sont dévoilées dès le début du film, elles peuvent heurter le spectateur, l’amenant à s’interroger dès les premières minutes sur les scènes auxquelles il assiste. On a un conte résolument moderne, qui s’affranchit de normes narratives, telles que les « il était une fois… » qu’on rencontre en littérature et qui se penche sur les problématiques rongeant actuellement l’être humain. Akira Kurosawa, le cinéaste japonais le plus marquant du XXème siècle écrivait ceci :
« Il y a quelque chose qui peut s’appeler beauté cinématique. Cela ne peut être exprimé que dans un film, et cela doit être présent pour que ce film soit un travail de mouvement. Quand cela est bien exprimé, l’expérience d’une émotion particulièrement profonde sera présente à la projection. Je crois que c’est cette qualité qui fait que les gens viennent voir un film, et c’est l’espoir d’atteindre cette qualité qui inspire le réalisateur pour réaliser le film. »

Cette définition peut nous aider à comprendre les œuvres et à se rappeler de leurs origines. Par son approche, le cinéma japonais est bien différent du cinéma occidental. En important cet art, on l’a transformé, le terme même utilisé pour le désigner différent. « Cinéma » vient du grec « kine » signifiant le mouvement, il s’agirait donc de transposer le réel à l’écran, ou en tous cas une vision qu’on en a. Au Japon, le rapport à la peinture est bien plus présent (ce qui explique probablement le succès du dessin animé). D’ailleurs les premières stars japonaises du cinéma sont issues du Kabuki, une forme traditionnelle du théâtre japonais, qui est encore représentée et extrêmement codifiée à travers les gestes précis des acteurs, leurs masques, le maquillage (une véritable peinture sur visage, propre au Kabuki et immédiatement reconnaissable), leurs costumes, etc. Ainsi, l’intention de réalisme n’est, déjà à l’origine pas la plus importante dans le cinéma japonais, ce qui est décuplé dans Air Doll. Les mouvements de Nozomi peuvent s’apparenter à une chorégraphie tant ils sont mesurés et gracieux. En visionnant le film on a ainsi conscience d’avoir sous les yeux un objet cinématographique, on ne se demande pas comment cette histoire est possible, pourquoi tel personnage a telle réaction à tel moment, on admet le film comme œuvre poétique, comme tableau vivant, à mi-chemin entre philosophie et esthétique. Personne n’est surpris de l’étrangeté de notre héroïne, on pense principalement à ses collègues. On ignore également comment elle est parvenue à trouver un travail et son possesseur ne comprend que tardivement qu’elle est en vie. Non seulement ces petites « incohérences » ne nous choquent pas mais elles ne nous privent pas de cette émotion dont parlait Kurusawa, ces détails n’ont finalement pas grande importance. Cela permet à la poésie de primer dans ce film, elle n’en affleure pas, elle en est le corps ou plus précisément le souffle…

Une des thématiques principales du film est effectivement l’air ou le souffle de l’être humain, souffle vital, air échangé avec l’autre. Cela rejoint la réflexion sur l’altérité que l’on retrouve dans le poème évoqué par le vieillard qui nous sera lu en voix-off.
Cette jeune femme, femme par son physique et enfant dans son esprit découvre le monde puis l’amour ou tout du moins une relation privilégiée avec un autre, elle est en décalage avec sa propre réalité. Le personnage que l’on pourrait qualifier de lyrique représente un beau paradoxe. Comment une poupée créée pour assouvir les fantasmes peut-elle être aussi pure et naïve ? Des détails très pratiques tels que son nettoyage nous sont d’ailleurs montrés, relevant d’une opposition entre l’aspect purement matériel de la jeune femme et la poésie qui émane d’elle. On peut considérer qu’elle vient de naître, tel un nouveau-né elle observe ce qui l’entoure avec un désintérêt total, dans le sens où elle ne regarde pas les choses pour ce qu’elles peuvent lui permettre d’obtenir mais pour elles-mêmes. Contrairement aux autres personnages, elle n’est pas égocentrique, elle ne vit pas non plus tournée vers le passé mais bien dans le présent. Son regard est neuf, chaque objet rencontré a son importance, on songe à la bouteille échouée sur la plage. C’est ce statut qui lui permet de saisir la beauté du monde qui l’entoure et la poésie de ce paysage urbain, elle est notre porte vers cet univers. Ce quotidien « métro-boulot-dodo », on le connaît mais c’est grâce à elle qu’on le perçoit différemment, c’est elle qui se promène dans un jardin vide et fait ainsi une singulière rencontre. Etre dans le monde sans vraiment lui appartenir est une curieuse sensation, on a pu l’éprouver en faisant l’école buissonnière et en se promenant dans différents quartiers de notre ville. Cette expédition sous forme d’errance est un élément constructeur de notre identité. En marchant sans réel but, on se cherche, on tente de comprendre ce que l’on voit et on se coupe d’une routine contraignante, de ses obligations. La jeune femme commence par suivre des petites filles et imiter leurs gestes, elle voudra leur ressembler, c’est ainsi qu’elle se fera être humain par un mécanisme de mimétisme de l’autre. Nous avons fait de même, nos premiers mots n’étant que l’imitation de sons entendus. C’est encore un message sur l’être humain, chacun de nous essaye d’être homme par imitation de ce qui l’entoure et chacun tente de trouver sa place dans la société en fonction de ses expériences passées.

L’expérience est un thème primordial puisque les poupées ne sont pas marquées par la génétique, notre personnage principale ne vit donc qu’à travers elle-même si son créateur semble avoir apporté beaucoup d’attention à sa création, lui affectant une légère singularité (elle n’a pas été conçue de manière industrielle, chaque exemplaire est donc différent). Et cet objet animé achèvera sa quête identitaire chez son créateur, le fabriquant de poupées gonflables. Pourquoi la qualifier de personnage lyrique ? Sa découverte de la nature est étonnante puisque cet être finira par s’y fondre. Le personnage se dégonflera dans un espace extérieur à la fin du film, son souffle s’échappera dans l’air tandis que son enveloppe non plus charnelle mais plastique, sans valeur échouera sur le trottoir, près des poubelles. On se demande si nous ne sommes pas tous des « air doll », ce qu’insinue le créateur de la poupée, un être paradoxal qui se pose en artiste malgré le métier qu’il exerce. Il semble aimer ses poupées, les respecter, ce qui expliquerait la transformation de notre « sexy Pinocchio ». Les exemplaires usagés sont des « ordures non combustibles » dit-il avant d’ajouter « Nous sommes tous des êtres combustibles. a ne fait pas une grande différence. » Le parallèle entre la poupée et les êtres humains est filé durant tout le film, le vieillard affirme n’être qu’un « ersatz de vide ». Un nouveau paradoxe s’offre à nous, en voulant devenir humaine la poupée se rapproche des hommes, les imite et essaye de les comprendre, c’est alors qu’elle réalise qu’ils ne sont en réalité pas bien différents d’elle. En s’éveillant, elle devient presque plus humaine que les hommes, le regard éteint, qui sont inanimés (en latin, anima signifie le souffle et par extension la vie), inanimés à force de vivre. Ce qui importe le plus est donc notre respiration, notre énergie vitale c’est-à-dire tout ce qui restera de notre « air doll ». Alors qu’elle voulait sincèrement devenir humaine, qu’elle était mélancolique en voyant une petite fille fêter son anniversaire, qu’elle aspirait à vieillir, manger, passer le temps comme le font les autres, elle a compris que ces autres n’étaient pas heureux et que la souffrance faisait également partie de ce monde.

On pourrait ouvrir une courte parenthèse digressive et parler de Eva, récemment sorti. Le but des scientifiques y est de créer un robot qui soit le plus humain possible mais qui soit un humain parfait, or l’humain parfait n’existe pas. En atteignant leur but, c’est-à-dire créer un robot aux réactions humaines, et en constatant plus tard des conséquences qui s’avèrent désastreuses, ils sont stupéfaits. La colère, sentiment humain, n’est pas comprise, on considère que le robot est mauvais et on décide de le détruire. Ce robot n’était pourtant pas mauvais, il était devenu humain, avec tout ce que cela implique de bon et de mauvais. Des sentiments négatifs succèdent aux sentiments positifs, on fait des erreurs, des accidents arrivent, c’est la vie et elle ne peut être calquée sur un idéal préconçu.
Mais revenons à notre film, Nozomi (le prénom que lui a donné son « possesseur » initial, prénom de son ex-compagne) hésite à devenir humaine après avoir découvert le monde tel qu’il était. Elle décide toutefois de vivre comme les autres et renonce à son statut d’objet. Elle cesse de se regonfler à l’aide d’une pompe et laissera sa vie se faire et se défaire, comme celle des humains pour finalement mourir dégonflée. On note qu’elle aussi est à l’origine d’un crime, elle tue le jeune employé de boutique et pourtant cela n’entache pas sa pureté, ce crime n’est que le fruit de son ignorance.

Si le lyrisme est expression d’une subjectivité, d’une quête de soi, il s’agit souvent de parler de soi dans son rapport à l’autre, un détour inévitable. On remarque que les personnages qui entrent en relation dans le film semblent murés en eux-mêmes, emprisonnés dans leur propre vie et leurs tourments. Toute véritable communication est donc impossible, aucun échange ne s’effectue véritablement. On parlera plus tard du cas du possesseur de la poupée gonflable mais penchons-nous déjà sur l’employé du magasin. Ce jeune homme a le regard vide, il semble totalement dépressif, désabusé et sans espoir (comme tous les personnages aperçus à travers des diverses petites scènes). Il a perdu ce que les enfants possèdent de plus précieux : l’étonnement. Cela le conduit à s’intéresser à cette étrange jeune fille, il a compris qu’elle était différente et cherchait à communiquer avec le monde, capacité qu’il a perdu. C’est la base de leur relation, ce sont deux êtres qui se sentent vides et qui cherchent la complétude par l’intermédiaire de leur rencontre ou passion si l’on peut nommer ainsi cette relation. Cela va se faire par l’échange des souffles, non au sens figuré mais bien au sens propre, ce qui confère au film une portée symbolique notable. L’autre est celui qui nous fascine, nous attire précisément en raison de son caractère autre, il peut ainsi provoquer notre perte comme notre épanouissement. Le poème japonais illustre cette relation conflictuelle à l’inconnu, la vie nourrirait « en son sein une absence propre que seul un autre peut combler ». La solitude de l’être est encore plus flagrante dans la passion, le lyrisme amoureux est habité par une douleur profonde, d’un déchirement de l’individu qui cherche sa moitié tout en sachant qu’une pleine fusion est impossible ou éphémère. Elle ne peut raisonnablement être une remède à la solitude éprouvée.

On s’achemine vers la fin du film, la mort directement liée à la liaison de notre personnage principal avec ce mystérieux jeune homme. Les allusions à l’amour ou son ersatz se tissent donc en un réseau antithétique, d’une part la vie, de l’autre la mort. On peut alors considérer que le lyrisme amoureux rejoint le genre tragique, le déploiement des sentiments semble n’avoir d’autre fin que la mort du sujet. On comprend ici tout le sens du rapprochement entre le désir et la mort, rapprochement au fondement de nombreux mythes. Tandis que la jeune femme aspire à vivre, le jeune homme représenterait dès le début l’ombre de la mort. Leur rencontre ne pourra changer cela, aucun des deux personnages ne veut réellement l’autre, ils ne se connaissent pas, et surtout ne cherchent pas à se connaître. Dans le Vice-Consul de Marguerie Duras qui s’est largement penchée sur cette thématique, Anne-Marie Stretter disait : « Nous n’avons pas besoin de nous connaître davantage. Ne vous trompez pas. » C’est exactement le même type de relation que nous avons ici. Quand ils se regardent, les personnages ne se voient pas vraiment, il n’y a que leur élan vers l’autre, chacun reste profondément seul et ne peut sortir de cet état. On a besoin de l’autre mais on ne parvient à le trouver réellement.

Cette idée est largement développée dans le bouleversant Nobody Knows qui sonde la solitude de l’être humain dans un paysage urbain, serait-ce le mal de nos villes modernes ? Ces espaces sont devenus essentiels au Japon, la vie rurale étant extrêmement marginale. En effet cette thématique hante les films de Kore-Eda, la ville est un espace de profonde solitude où les regards se croisent mais ne se rencontrent pas. Le possesseur de Nozomi emprunte les transports en commun, un motif récurrent dans ses films. (ce qui se révèle central dans le dernier : I wish) mais la jeune femme se promène à pied, elle renoue avec la nature et est plus ouverte sur le monde. Cette redécouverte poétique d’un espace fréquenté quotidiennement est évoquée par l’écrivain Sôseki dans Oreiller d’herbes : « Simplement parce qu’une brume réside dans l’œil et des fleurs du vide tombent, que les rênes des préoccupations d’ici-bas sont difficiles à rompre et que le souci des vanités sociales vous obsède constamment, on ne comprenait pas la beauté d’une locomotive, jusqu’à ce que Turner peignît des locomotives et jusqu’à ce que Okyô peignît des fantômes, on ne comprenait pas la beauté d’un fantôme ». Le plus souvent, les personnages regardent à travers la vitre d’un train, le regard triste. On se rappelle dans Nobody knows que les enfants ne dialoguent avec quelqu’un provenant de l’extérieur que grâce à la nature, le jardinage. Cette idée et ce fond écologique sont en vogue chez des réalisateurs tels qu’Akira Kurusawa ou évidemment Hayao Miyazaki. Le caractère pitoyable de la solitude de l’homme ayant nommé Nozomi est éclatant, presque gênant. Il prend des poupées gonflables pour se donner l’illusion qu’il n’est pas seul, ce ne sont pas de simples jouets sexuels puisqu’il leur parle. D’une part, il nettoie mécaniquement la « partie vaginale » de la poupée, d’autre part il prend un bain avec elle, lui parlant et lui lavant les cheveux avec le shampoing de son choix, acheté spécialement pour elle. En partant travailler, il lui dit « à ce soir », il crée ainsi une relation ambigüe et peu saine avec elle. Si Nozomi est surprise en rencontrant le jeune homme travaillant à la boutique c’est qu’elle n’avait connu qu’une relation à sens unique, la rendant passive et la chosifiant. En effet les poupées sont interchangeables, l’homme leur donne la personnalité qu’il souhaite, les associant vaguement à une ancienne relation, il ne peut alors pas souffrir d’un abandon. Quand une poupée est usée, il en commande une autre, tout simplement. Il ne veut pas réellement s’attacher à elle, c’est un moyen de se protéger des déceptions passées. Il a ainsi l’illusion d’être en couple sans en avoir les supposés inconvénients. Enfermé dans son morne quotidien, le personnage ne prend aucun risque, il ne se confronte plus à l’altérité qui lui fait peur, pour résumer il refuse la vie et se complaît dans sa médiocrité. Son malheur le rend égocentrique, il n’est plus capable de prêter attention à une autre personne que lui même.

D’après le réalisateur, le film interroge la capacité des hommes à combler leur propre vacuité et comme son nom l’indique, Air Doll a pour sujet principal le vide qui nous habite et nos tentatives de le combler. Le film s’achève sur une note d’espoir puisque notre poupée gonflable ne disparaît pas totalement, son souffle se mêle au vent. On la remarque enfin, sa douce présence est palpable à travers l’air, peut-être même que la nature apaisera les êtres. Dans cet espace urbanisé, elle ne tend qu’à une chose : reprendre son droit. Ce souffle de l’air est omniprésent, on perçoit la brise, on nous la donne à voir grâce à un petit moulin à vent pour enfant. La première fois qu’on l’aperçoit, il se situe au premier plan, derrière le vieillard filmé de dos, vieillard qui incarne la sagesse et qui a réussi à comprendre voire dépasser les contradictions de la vie. On nous donne à entendre cette brise porteuse d’espoir par l’intermédiaire du carillon, enfin l’âme de Nozomi résonne.

1 Comment

  • tyu Says

    dans le video club il est indiqué  qu’on recherche un vendeur . ainsi on peut comprendre qu elle a repondu a l annonce c est pourquoi elle y travaille voila donc pas d incoherence pour cela ;) 

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